Retour en mots/maux et en images sur la dixième édition du Fospa
Le onzième Forum social panamazonien (Fospa) s’est tenu à Rurrenabaque, en Bolivie, du 12 au 17 juin. Cet événement majeur a réuni 1500 participants provenant de divers horizons, dont une délégation de 15 personnes qui a fièrement représenté la Guyane.
Quinze cents personnes étaient présentes en Bolivie du 12 au 17 juin pour assister au onzième Fospa : Membres d'associations indigènes, Quilombolas (au Brésil, un quilombo désigne la communauté formée par les esclaves en fuite dans des régions reculées. Le terme désigne la même réalité que les Palenques du monde hispanique), afro-descendants, paysans, riverains, Raizals (population indigène des îles San Andrés, Providencia et Santa-Catalina, en Colombie, descendant de l’union entre Européens et esclaves africains), groupes urbains, jeunes, femmes, représentants des gouvernements locaux, universitaires et membres de la société civile.
Avant cet événement, le Fospa local de Guyane a eu lieu à Cayenne le 11 mai 2024. Plusieurs séances de dialogue ont été organisées pour préparer les participants autour du thème central du « Bien vivre ensemble ».
Quatre axes principaux ont guidé les discussions :
Peuples autochtones et populations amazoniennes
Terre nourricière
Extractivisme et alternatives
Résistance des femmes
Chaque axe comportait des groupes de travail abordant des sujets spécifiques tels que l'autonomie et la justice chez les peuples indigènes, les droits des défenseurs, la crise climatique, l'eau, la transition énergétique, l'expansion de la frontière agricole, les territoires, la participation des femmes…
Les participants guyanais ont activement contribué aux discussions, mettant en lumière les disparités de niveau de vie, les inégalités d’accès aux services de santé, à l’éducation et aux infrastructures. Le Yopoto du village Kuwano et chef du "Grand Conseil Coutumier" a dénoncé la non-reconnaissance des peuples autochtones par la classe politique guyanaise. Il a souligné les difficultés financières des villages rattachés aux communes pour subvenir aux besoins de leurs habitants, les problèmes causés par l’orpaillage illégal et légal, ainsi que la dégradation de la biodiversité.
Voici son témoignage :
"La classe politique guyanaise ne reconnait pas les peuples autochtones en tant que peuples à part entière du territoire.
Les villages qui sont rattachés aux communes, ne peuvent pas subvenir financièrement aux besoins des habitants des villages autochtones. Que ce soit en matière d’infrastructures collectives ou d’aides, d’accès aux services de santé, d’éducation, d’accès à nos propres ressources.
Nous faisons face à l’orpaillage illégal, et légal qui engendre de graves problèmes de santé, détruit notre forêt et toute sa biodiversité.
Au-delà, bien que Français vivant dans le bassin amazonien, nous sommes à 8000 km de la métropole française. La position politique des peuples autochtones n'est pas prise en compte. Nous n’avons pas la reconnaissance pourtant garantie par les textes internationaux.
Nous devrions être reconnus spécifiquement comme membres du bassin amazonien et protégés aussi par ces textes internationaux.
Nous pensons que le Fospa doit s’équiper de mécanismes comme celui de la surveillance et de la sécurité. Nous avons besoin d’un suivi dans tous nos pays, pour qu’internationalement nos rapports soient apportés aux plus haut niveaux.
Nous aspirons à l’autodétermination des peuples autochtones de Guyane et de toute la population de Guyane."
Nora Stephenson, coordinatrice du Fospa de Guyane, a pris la parole pour dénoncer les graves problèmes de santé publique et les destructions écologiques liées à l’orpaillage. Elle a souligné que, bien que riches en ressources naturelles, les populations locales n’en bénéficient pas, subissant au contraire les conséquences néfastes de leur exploitation.
"La Guyane fait partie de tous ces pays pauvres de l’Amazonie, parce que les ressources sont chez nous mais ça n’est pas nous qui en profitons et ce qu’on nous laisse c’est la mort. C’est pour cela que l’on ne veut pas d’extractivisme en Guyane…"
À partir de tous les témoignages portant sur les problèmes de l'Amazonie, les différentes assemblées ont élaboré des propositions d'action pour les endiguer et un document final a été produit intitulé « Mandat du onzième Fospa ».
Il résume les résolutions approuvées dans les assemblées et exprime la position politique du Comité international du Fospa.
La participation de la Guyane au onzième Fospa a permis de porter haut et fort les voix des populations locales, de mettre en lumière leurs défis et leurs aspirations, et de contribuer à l’élaboration de solutions concrètes pour un avenir plus juste et durable.
Le Secours Catholique de Guyane est fier d’avoir été un acteur-clé de cet événement, en soutenant les initiatives locales et en renforçant les liens de solidarité à travers l’Amazonie.